

Xavier Brignon : un homme audacieux et brillant !
C’est l’histoire d’un homme dont chaque dessert porte le parfum d’une rencontre ou d’un souvenir. Un homme qui vit à cent à l’heure et dont la devise est « fais un métier que tu aimes et tu n’auras jamais à travailler ». Un homme audacieux, entouré d’une équipe dont il ne cesse de vanter les mérites, qui détient l’une des plus belles maisons de Franche-Comté. Rencontre avec Xavier Brignon un brillant chef (d’entreprise) pâtissier, installé depuis 2015 à Besançon.
Questions « personnelles » :

Pouvez-vous nous raconter vos débuts ?
Je suis issu du monde de la cuisine. J’ai commencé par l’école hôtelière de Besançon où l’on a rapidement détecté en moi un « bec sucré ». J’ai donc intégré une pâtisserie et j’ai bien fait : l’histoire veut que ce soit celle que j’ai rachetée 30 ans plus tard ! Mes destinations de travail ont ensuite été guidées par mes deux passions : la pâtisserie et le snowboard. Je suis parti au Canada, aux États-Unis, autour du lac Léman, à Courchevel… Je suis quelqu’un de curieux qui a soif d’apprendre et qui s’ennuie vite ! C’est la raison pour laquelle il me faudrait 4 pages pour rédiger mon CV. J’ai travaillé dans de nombreux endroits, dans tout types de maisons, ce qui m’a permis de développer ma polyvalence et de parfaire ma capacité d’adaptation.
Parlez-nous des championnats de France de dessert auxquels vous avez concourus.
J’ai participé à 3 concours nationaux et à chaque fois, je suis arrivé 2e. Cette position m’a permis de me rappeler que je n’étais pas encore au bout du chemin et que je pouvais m’améliorer. J’ai toujours regardé ceux qui étaient devant moi, pas derrière. Inconsciemment, je pense qu’être second m’a plus servi que d’arriver premier ! C’est ce qui m’a motivé à devenir meilleur dans mon métier.
L’expérience qui vous a le plus apporté ?
Mes années chez Franck Fresson ! J’ai pris une claque au niveau de l’exigence, du besoin de faire du beau et du bon à partir de produits de grande qualité. Là-bas, nous étions une équipe soudée autour d’un même capitaine. Chaque membre de la brigade savait « mouiller son maillot » pour le chef. Cette époque a été une formidable expérience tant humaine que professionnelle. Passer par chez Franck Fresson a vraiment été la meilleure chose que j’ai faite avant de m’installer ! Nous nous sommes d’ailleurs tous imprégnés de cette exigence et aujourd’hui nous sommes tous dans de belles maisons.
Ça ressemble à quoi une journée type de Xavier Brignon ?
Je déteste me lever tôt ! J’arrive au laboratoire vers 5h30 et mes équipes se présentent vers 6h, ce qui est plutôt tard dans la profession, mais je ne veux pas imposer des choses que je n’apprécierais pas. Nous commençons par passer en revue les commandes, puis nous avons deux heures pour préparer la fournée avant que cette dernière ne quitte les laboratoires en direction du magasin qui se trouve à 4 kilomètres de là.

Ensuite, nous prenons un café tous ensemble, puis j’organise la journée sur chaque poste. Je suis une vraie tour de contrôle : rien ne sort sans être passé entre mes mains ! Vers 11H j’appelle Eve, ma compagne qui gère la boutique et nous faisons le point sur ce que nous devons remettre en production. Puis j’enfile ma casquette de chef d’entreprise : je fais le point sur le chiffre d’affaires de la veille, je rencontre les fournisseurs, je m’occupe de l’administratif et des démarches commerciales, je regarde comment nous pouvons encore optimiser notre temps de production et augmenter la valeur ajoutée de mes équipes. Mes collaborateurs partent vers 15h et je termine ma journée vers 18/19h. C’est une vie assez intense !
Qu’est-ce qui vous anime le plus dans votre métier ?
La créativité mais surtout le plaisir de faire plaisir ! J’aime quand on a des retours élogieux sur nos desserts ou que nos publications sur les réseaux sociaux reçoivent de bons commentaires ! Ma pensée est un peu difficile à suivre mais quand on met ce que l’on est dans ce que l’on fait, et que ce que l’on fait plait, ça fait vraiment chaud au cœur !

Si vous n’aviez pas été pâtissier, vous auriez été …. ?
Militaire je pense, car j’aime la rigueur et la hiérarchie. Ce sont d’ailleurs des principes que l’on retrouve dans une brigade de cuisine ! Sinon, je crois que j’aurais été David Guetta !
Quel pâtissier admirez-vous ?
Il y en a deux. Franck Fresson d’abord avec qui j’ai travaillé et qui m’a appris l’exigence, le goût du travail bien fait et l’importance des bons produits. Christophe Michalak, ensuite évidemment, dont le talent et la belle gueule ont réussi à redorer le blason de nos métiers et à nous faire sortir de nos laboratoires. Il a mis les pâtissiers sur orbite et rien que pour cela, toute la profession peut le remercier.

Questions "professionnelles" :
Comment définiriez-vous votre pâtisserie ?
« Simple, sobre et efficace » pour reprendre les célèbres termes de Christophe Michalak. J’ajouterais « saisonnière ». Aujourd’hui, les framboises en hiver, c’est non ! Nous avons un calendrier des produits de saison affiché dans le labo qui nous permet de travailler les bons produits au bon moment. Au départ, nous avons eu un peu de mal à faire accepter à nos clients habitués à manger des framboisiers toute l’année qu’ils n’en trouveraient plus chez nous en décembre, mais, une fois les explications données, ils ont compris et approuvé notre décision. J’ajouterai enfin « évolutive ». Chez moi tout est en perpétuel mouvement… Ce qui fait que je suis parfois difficile à suivre !
Votre avis sur le désucrage ?
J’ai lu le livre Gourmandise raisonnée de Frédéric Bau et j’avoue qu’il m’a mis une grosse claque ! Si ma pâtisserie est gourmande, elle s’inscrit aussi dans la volonté d’être moins riche en apport calorique et donc meilleure à la santé. Notre pâtisserie évolue aussi vers le sans gluten, car de plus en plus de personnes présentent des intolérances. Nous avons d’ailleurs mis au point une pâte à tarte, à base de farine de châtaigne qui est excellente. Au goût, il est impossible de détecter qu’elle ne contient pas de gluten si l’on ne le sait pas !

Quel est le dessert signature de votre boutique ?
Le Kenya ! C’est un entremets à base d’un pain de gêne au citron, d’un crémeux mangue-ananas, d’un confit passion et d’une mousse légère à l’ananas, décoré comme une girafe ! Je l’ai créé il y a 7 ans et il continue de voyager avec nous, même s’il connaît des évolutions assez fréquemment. D’ailleurs, les dernières datent d’il y a moins de 15 jours !
Une spécialité chocolat au sein de votre boutique ?
Nos pralinés ! Les gens font parfois 60 km pour eux ! Ils sont nos best-seller. Notre dernier né est un praliné Sobacha, un sarrasin torréfié venu du Japon.
Quel est le dernier entremets que vous avez créé ?
Le Mada, un entremets né suite à mon voyage à Madagascar avec Valrhona. C’est un croustillant praliné Sobacha avec un crémeux à la vanille de Madagascar, un pain de gêne au chocolat et une mousse au chocolat grand cru, issu de la plantation Millot.

Une création particulière pour Pâques cette année ?
Vue la période, je voulais créer un dessert à base de chocolat. Ma compagne, qui est à la boutique et, de fait, en contact direct avec la clientèle, m’a soufflé de partir sur une création qui apporterait un « vent de fraicheur » ! Alors, nous avons travaillé sur un entremets printanier à base de crèmeux Yuzu, de fraise Maras des bois et d’un biscuit pistache, histoire de faire venir le soleil et de mettre fin à cette longue période hivernale !
Un secret ou un tour de main à nous partager ?
Les infusions longues et à froid. Par exemple, lorsque je dois préparer une crème anglaise au thé ou au café, je fais infuser les ingrédients dans le lait froid pendant 24h ou 48h à l’avance. Avec un produit ainsi moins matraqué, le rendu est plus doux, plus subtil.
Questions « Valrhona » :

Quel est votre produit Valrhona-Ensemble préféré ?
La Vanille Norohy. Nous travaillons beaucoup avec la vanille de Madagascar. Ceci étant, la vanille Tahiti est terrible aussi! L’année dernière nous avions fait une glace au lait fermier et à la vanille Norohy de Tahiti : au top !
Même question pour le chocolat ?
Avant, je vous aurais dit le Manjari mais depuis que Valrhona nous a permis de visiter la plantation Millot à Madagascar en 2019, je vous répondrais le Millot 74%. Rencontrer les producteurs, humer le parfum des fèves à même les sacs de récolte, a donné une saveur toute particulière à ce chocolat que je travaille beaucoup depuis.


Un mot sur l’initiative Valrhona Ensemble ?
Valrhona a soutenu ses artisans dès le début de la crise, notamment en mettant en place le site Valrhona Ensemble en un temps record. Ils se sont positionnés comme de vrais partenaires et non comme des fournisseurs. Je crois que nous nous sommes tous sentis accompagnés, et ça, ça fait du bien. L’initiative a permis de drainer une nouvelle clientèle au sein des boutiques. Jusqu’à présent, personne n’est venu récupérer sa commande sans repartir avec des produits de chez nous ! Le deuxième effet bénéfique de ce site est qu’avant la crise sanitaire, nous organisions des ateliers de pâtisserie et nous peinions à orienter à nos clients lorsqu’ils nous demandaient où s’approvisionner en produits Valrhona. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus organiser de cours de pâtisserie mais nous avons un coin pâtissier qui offre aux pâtissiers en herbe un choix de produits de qualité qui permet d’exercer leur passion !
Portrait chinois
Si vous étiez un dessert ?
Le flan ou le gâteau de semoule parce que le flan, c’est quand même pas très joli! (Rires). Vous savez, on est tellement dans l’exigence quand on travaille dans nos métiers que je suis le plus heureux quand ma femme me fait un simple gâteau de semoule.
Si vous étiez un chocolat ?
Le Jivara pour son coté gourmand ! C’est un chocolat iconique, une institution, et en place depuis longtemps… comme moi en fait ! (Rires)

Si vous étiez un parfum de glace ?
Vanille forcément !
Si vous étiez un fruit à associer au chocolat ?
Je dirai un agrume … le citron. On fait un entremets citron-chocolat qui matche bien !
Merci
Merci à Xavier Brignon, pour sa bonne humeur et le temps qu’il nous a accordé.